Prince Henri Auditoire 02 BW

Publication du Cahier d’études n° 200 - When health affects income (and viceversa): Policy transmission in a heterogeneous agent life-cycle model

23.09.2025

Auteurs: Pablo GARCIA SANCHEZ et Olivier PIERRARD

 

L'évaluation stratégique 2025 de la BCE considère le vieillissement démographique comme un défi pour la conduite de la politique monétaire. En effet, le vieillissement a des effets sur la productivité, la croissance économique, les finances publiques et l'inflation. Ce papier se concentre sur le lien entre richesse et espérance de vie, qui est observable dans tous les pays et qui reste stable dans le temps. La richesse et la santé sont liées de plusieurs façons. La richesse peut améliorer la santé, par exemple en facilitant l'accès aux soins ou à une meilleure alimentation. Inversement, la santé influence la capacité à travailler et donc à gagner sa vie. D'autres facteurs, comme l'éducation ou les gènes, peuvent aussi jouer un rôle à la fois sur la santé et les revenus.

 

Mieux comprendre les liens entre revenus et santé est important pour évaluer correctement l’impact des impôts et de la redistribution sur la santé publique. De même, ces liens déterminent l'impact que peut avoir une politique de santé pour réduire les inégalités de revenu. Ces inégalités peuvent réduire l'efficacité de la politique monétaire, qui peut elle-même influencer les inégalités.

 

Dans ce papier, nous étudions la relation revenus-santé à l’aide d’un modèle de cycle de vie. En vieillissant, un individu voit son niveau de santé se détériorer progressivement : c’est ce que nous appelons le « déficit de santé ». Ce déficit a trois effets négatifs : il coûte cher en soins (soins longue durée, traitements, etc.), il réduit la productivité et donc les salaires, et il augmente le risque de décès. Cependant, les individus peuvent ralentir ce déficit en investissant dans la prévention (alimentation saine, sport, vaccins, dépistage...).

Ainsi, notre modèle inclut un effet de la santé sur le revenu : une mauvaise santé réduit les salaires. Il inclut aussi l’effet inverse : les plus riches peuvent investir davantage dans la prévention. Bien que ces deux effets soient connus, la plupart des modèles existants n’en retiennent qu’un seul à la fois.

 

Notre modèle reproduit bien la corrélation entre revenu et espérance de vie qui est observée dans les données. Il suggère aussi que l’effet du revenu sur la santé est plus fort au début de la vie. À ce moment-là, les individus dont le revenu est plus élevé investissent davantage dans la prévention, restent en meilleure santé et gagnent plus par la suite. Plus tard, la santé devient plus inégale selon les décisions prises plus tôt, et influence davantage les revenus. Nous utilisons ensuite le modèle pour étudier deux types de politiques : des redistributions de revenus (comme les aides forfaitaires) et des politiques ciblant la santé (comme les subventions à la prévention). Toutes sont financées par un impôt proportionnel sur le revenu du travail.

 

La subvention santé réduit le prix relatif de la prévention. Cela améliore la santé de tous, et donc la productivité, les salaires et l’espérance de vie. Ces effets vont dans le sens des données empiriques. Cependant, une subvention santé ne saurait pas diminuer les inégalités. Par contre, une politique de redistribution des revenus réduit non seulement les écarts de revenu, mais aussi les inégalités de santé. Par conséquent, elle décourage aussi la prévention. En effet, la redistribution affaiblit le lien entre santé et revenu, et donc réduit l’intérêt d’investir dans sa santé. Cela réduit le niveau de santé dans la population, ainsi que le niveau de revenu moyen et l'espérance de vie.

 

Notre recherche montre donc que des politiques de santé peuvent aussi impacter la situation économique des agents, et vice-versa.

 

 

Le contenu de cette étude ne doit pas être perçu comme étant représentatif des opinions de la Banque centrale du Luxembourg ou de l’Eurosystème. Les opinions exprimées reflètent celles des auteurs et non pas nécessairement la position de la Banque centrale, de ses dirigeants ou de l’Eurosystème.

 

 

Ce cahier d’études est disponible sur le site internet de la BCL : www.bcl.lu